Réforme du collège : une vraie fausse bonne idée ?
La réforme entrera en vigueur en septembre prochain…toutes les équipes éducatives la préparent, les journaux en parlent, les reporters télé sont sur le qui-vive… attention, c’est parti !
Avec les enseignants de l’établissement dans lequel je travaille, nous avons eu deux journées pédagogiques pour être fin prêts en septembre 2016 …Réunion, formation, dialogues entre collègues …réflexions intenses pour tenir compte des nouvelles inflexions impulsées par la réforme.
Je ne veux pas analyser toute la réforme, mais je voudrais ici me pencher sur les EPI. Enseignements pratiques interdisciplinaires…Ceux-là même dont on nous dit que ça va TOUT changer.
QU’est-ce que c’est ? Une proposition de mener à plusieurs collègues de matières différentes des projets communs afin de motiver les élèves. (Entre parenthèse, je viens là de synthétiser 3 h de la dernière réunion pédagogique animé par un enseignant très motivé) Bref…parfois il est pertinent d’expliquer longtemps pour que chacun comprenne.
Alors des exemples ?
Le décès de Claude François aurait dû servir à faire passer les principes physiques de la notion de l’électrocution. Les éditions Bordas ont abandonné l’idée initiale qui était que le cours aurait dû s’appuyer sur un cas pratique liant la physique-chimie aux SVT (Sciences et vie de la Terre). Devant les réactions vives sur les réseaux sociaux, cette idée a été abandonnée.
Alors prenons d’autres exemples : étudier la notion d’agglomérations en rapprochant les cours faits en géographie et ceux de langues avant un voyage à l’étranger par exemple. Ou bien, étudier la notion de mémoires en rapprochant les cours de Français et d’Histoire …Ou bien … en fait tout est possible dès lors que deux ou trois enseignants se mettent d’accord pour étudier une partie de leur programme à partir de la mise en place de ces fameux EPI.
Idée révolutionnaire ?
J’en doute …
Tout d’abord, c’est omettre que les enseignants le font déjà. Parce que trouver du sens, c’est bien ce que l’on cherche dans nos programmes. L’idée d’encourager d’autres enseignants à le faire, se défend …mais a-t-on des moyens concrets pour échanger, pour travailler ensemble ? Non, bien sûr. Ceci doit se rajouter à ce qui se fait déjà. Mais quand on aime, on ne compte pas…c’est bien connu.
Idée révolutionnaire ?
Cela devrait selon le formateur qui nous a éclairés de ses lumières, améliorer l’investissement des élèves car cela permet de « privilégier la démarche de projets pour aboutir à des réalisations concrètes »…ah bon ! Et selon les textes officiels : les élèves vont travailler sur des sujets proches et voir « converger les savoirs disciplinaires pour mieux appréhender leur utilité et la façon dont on peut les convoquer pour comprendre des situations de la vie quotidienne ou comprendre les enjeux sociétaux ». Mais si la façon d’enseigner est la même, cela va –t-il les passionner ? Etudier les villes du monde …en géographie et en langues…. va-t-il rendre plus digestes la notion de CBD ? de suburbs ? de périurbanisation ?? Je ne crois pas.
Ce n’est pas le contenu qui compte mais bien la manière dont on le fait passer.
Et là ? Quelle directive ? « Accroître l’autonomie des équipes éducatives pour s’appuyer sur leur expertise. » C’est pertinent, certes. Mais là où je suis plus dubitative, c’est que lors de nos journées pédagogiques, je n’ai absolument rien entendu sur ce sujet.
Les huit formes d’intelligence ? La pédagogie par le jeu ? La nécessité de créer une pédagogie positive ? Je ne l’ai pas entendu évoquer, ne serait-ce qu’une seconde.
Alors, réformer s’impose, sur ce point aucun doute. Et il est de même absurde de vouloir déjà juger de l’efficacité de la réforme. MAIS… je ne peux que tristement regretter que les orientations ne prennent pas en compte certains besoins essentiels : le nombre d’élèves par classe, le rythme imposé aux enfants, la formation des enseignants à des pédagogies plus novatrices …etc.
Wait and see.
Et d’ici là, restons motivés afin de stimuler intelligemment nos élèves.