L’école… Lieu de souffrance
Mon métier d’enseignante me place au contact direct des deux partenaires clefs de l’école, à savoir les enseignants d’un part et les élèves d’autre part.
Mon constat ? Tout le monde souffre.
J’entends des collègues exprimer leurs difficultés à transmettre avec intelligence ce que le programme leur impose de faire. Un collègue de mathématiques me disait combien il était mal de ne pouvoir aider les élèves qui ne comprennent pas sa matière. Les classes, dans leur constitution, le programme qui lui est demandé de transmettre et le rythme qui en découle, bloque la possibilité qu’il aurait de faire passer efficacement son savoir. Il concluait que soit l’élève comprend, et c’est tant mieux, soit il ne comprend pas ou plus et dès lors, c’est irrattrapable. Un autre collègue me faisait remarquer combien le nouveau programme d’histoire géographie empêchait de proposer aux élèves des sujets qui invitent à réflexion. Désormais, les terminales rédigent des pages et des pages qui sont pour beaucoup une simple récitation. Une autre collègue exprimait ses difficultés à trouver du temps pour accompagner efficacement des élèves qui ne savent comment apprendre.
Du côté des élèves, les enfants à haut potentiel disent qu’ils s’ennuient. D’autres sont tellement en souffrance qu’ils ne peuvent plus venir à l’école. La phobie scolaire… Quand même !! Une mise sous nos yeux de ce que l’école est un lieu de souffrance pour les enfants. Et puis il n’y a qu’à regarder leurs visages… Ils sont tristes, abattus… Peu de sourires. D’autres réagissent par de la violence, ils se butent, ils dérapent… Mais c’est une autre façon d’exprimer que ce qu’ils vivent, ne leur convient pas.
Lieu de souffrance. Alors je parle de l’école parce que je connais, j’y travaille, je la vis de l’intérieur. Mais ce constat pourrait certainement être étendu à d’autres lieux.
Mais comme je suis un esprit pratique, le constat posé, je me dis, que faire ? Continuer ainsi, développer du ressentiment, de la colère ? Comptabiliser les nouveaux burnouts ? Laisser faire une énième réforme ? Attendre que la retraite arrive pour les profs ? Attendre les vacances ? La fin du calvaire pour tout le monde ?
Constater ce problème me déchire le cœur parce que je vois par ailleurs des deux côtés des personnes de bonne volonté. Je vois des enseignants qui veulent aider, transmettre, partager leurs connaissances. Je vois des élèves qui ont envie d’apprendre, qui travaillent, mais qui ne sont pas épanouis.
Et la rencontre ne se fait pas.
J’ai envie déjà que cette prise de conscience s’étende afin de permettre de passer à une éventuelle solution. Il est impératif que les acteurs de l’école soient conscients, que les profs réalisent combien les élèves en face d’eux sont mal et que les élèves réalisent combien les enseignants le sont aussi.
Cela n’amène pas à tout accepter sans rien dire. Il y a des profs qui sont imbuvables à écouter tant ils sont ennuyeux et il y a des élèves qu’on passerait par la fenêtre tant ils sont arrogants.
Il y a, je n’en doute pas, possibilité de dépasser ce triste constat pour en faire quelque chose de bien, de nouveau. Sans attendre que la solution tombe de je-ne-sais quel ministère ou de telle opération magique.